La complainte de la forêt de Bord – Poème de Christine Collen
La complainte de la forêt de bord
Je te vois, l’été chercher la fraîcheur de mon feuillage,
Admirer en automne ses multiples couleurs.
Je te vois, l’hiver affronter la froideur
De mon manteau glacé,
Et lorsque l’hiver effacé
Tu contemples ma biodiversité,
Et tu voudrais que je disparaisse ?
Je suis la charpente de ta maison,
Le lit dans lequel tu te reposes,
La coque de tes voiliers,
La chaleur de ta cheminée,
Le manche de ton outils,
La porte qui s’ouvre à tes amis,
Le berceau dans lequel s’endort ton tout petit,
Et tu voudrais que je disparaisse ?
J’ai accueilli tes ancêtres et j’accueille ton petit-fils,
Ensemble vous écoutez le chant du rossignol perché,
Je vous procure l’oxygène sans lequel vous ne pourriez exister,
Je suis vos poumons
Et tu voudrais que je disparaisse ?
Depuis 300 000 ans
Je régule le climat
Je veille sur l’écosystème
Je stocke le carbone
Je filtre l’eau
Je suis le vivant
Qui ! peut mieux que moi te protéger ?
Et tu voudrais que je disparaisse ?
Je vous sers,
Quand vous me rendez visite n’est-ce-pas ?
Je vous sers,
Même lorsque vous n’êtes pas là !
Je préserve la mémoire du passé,
conserve les graines de l’avenir,
J’abrite l’essence même de la vie,
Et tu voudrais que je disparaisse ?
Je protège tous les peuples de la nature
En leur nom,
Je pousse, un cri de colère
Auprès de ceux qui voudraient me détourner
De mes fonctions premières.
Entends, entends ma complainte ; écoute, écoute ma prière,
Ne me déçois pas, ne me détruis plus
Christine Collen juillet 2023