L’ASFA et LREM, la main dans la main, et la main dans la poche du contribuable ?
Nous avons vu la note de l’ASFA sur l’adossement des routes nationales au réseau autoroutier concédé.
Les routes nationales ont été intégralement financées par l’impôt. C’est un investissement pour l’usager qui a besoin de ces routes pour les déplacements quotidiens, et obligés.
Pour les riverains, il s’agit aussi d’éviter que les automobiles ne reviennent à leurs anciennes habitudes : traverser les villes et villages. C’est pour ça qu’on a payé une nationale, pour écarter le danger pour les plus jeunes et les plus vieux, et pour tous, pour la santé et la sécurité de chaque citoyen.
La reprise d’infrastructures existantes ! C’est la polémique actuelle lancée par la note de l’Asfa, qui réclame la mise en concession des routes nationales en 2×2 voies. Le réseau d’autoroutes concédées, c’est 9200 km. Mais il reste 2600 km d’autoroutes non concédées (appartenant à l’État), et 9600 km de routes nationales (mais seulement les nationales à chaussées séparées, et 2×2 voies intéressent les concessionnaires). Ce sont les plus rentables. Au total, les concessionnaires aimeraient voir passer dans leur giron 6822 km de ces routes. Le prix de base de la négociation ? Une économie d’entretien pour l’État. Le réseau français continue de se privatiser !
Ce n’est plus une polémique, c’est une loi, passée au travers de deux amendements de députés LREM, Joël Giraud et Anne-Laure Cattelot :
- amendement N°CF75 : Compléter l’alinéa 77 par les mots : « , le cas échéant en faisant porter par une délégation de service public autoroutier existante la création ou l’aménagement d’infrastructures à gabarit routier ayant pour effet de faciliter, sécuriser ou fluidifier l’accès à une autoroute ou aux itinéraires qui la prolongent. »
- Article additionnel : après l’article 40 TER, insérer l’article suivant ; I. : – L’article L. 122‑1 du code de la voirie routière est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Les autoroutes peuvent comporter des sections à gabarit routier, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État et tenant compte notamment de contraintes topographiques. » II..– Après la première phrase de l’alinéa 4 de l’article L. 122‑4 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Ces ouvrages ou ces aménagements peuvent porter sur des sections à gabarit routier ayant pour effet de fluidifier l’accès au réseau autoroutier. »
On pourrait dire “on privatise les nationales : chouette ! Moins d’impôts.” L’Asfa, dans sa note, explique que l’État pourrait économiser 14 millions € pour 100 km de nationale si on la concédait en autoroute.
Prenons l’exemple de la RN154, une 2×2 voies avec chaussées séparées, refaite à neuf au frais du contribuable, sans alternative routière ni ferrée, entre Rouen et Évreux. Entre 28.000 et 29.000 usagers par jour au dernier comptage. Un trafic autoroutier. Autrement plus important que ceux de l’A28 entre Bourg-Achard, l’A88, ou l’A150 entre Barentin et Yvetot (la partie à péage).
30 km, soit, selon l’ASFA, 4,2 millions € par an. Politiques, à vos tablettes. En attendant elle est presque remise à neuf (il reste des travaux en cours).
En appliquant une simple règle péage/km * TMJA * km * jours =>
0,17 centimes * 25 000 TMJA * 30 km * 365 j = 46,5 M€.
Ça, c’est avec un trafic modéré, un prix de péage comparable à celui d’autres infrastructures locales, comme l’A150. C’est un calcul pour 30 km, entre Val-de-Reuil et Évreux. Pas les 60 km entre Nonancourt et Évreux.
Même la moitié, c’est bien, même le quart c’est quand même le rêve, et pour une rente dont on ne connaît pas la date de fin.
Et tout cet argent, c’est celui de l’usager qui aura déjà investi dans cette même infrastructure par son impôt.
Même si la Dreal a bien promis lors de la concertation qu’il n’y avait pas de volonté de passer ce tronçon au statut autoroutier, il y a possibilité désormais de le faire légalement.
Et pourtant, c’est bien de cela dont parle la CCI de l’Eure, lors de la première réunion de concertation dans l’Eure, à Évreux (vidéo ci-dessus), ainsi que le président de l’Asfa (vidéo tout en haut).
L’133-A134 serait reliée directement à la RN154, pour une réalisation de 2020 à 2024. Le décret déclarant d’utilité publique les travaux de la future autoroute A154, de l’A10 près d’Orléans à Nonancourt, est paru au journal officiel du 5 juillet 2018. Cette autoroute, qui emprunte très largement les tronçons de la RN154, serait réalisée de 2024 à 2027.
A cette date, les 60 kilomètres de route nationale RN154 seraient reliées à chaque bout à une autoroute. D’où l’importance de se méfier des ces amendements. Que l’on soit contribuable, usager ou riverain. Pour le premier, il a déjà payé l’investissement. Le second ne veut pas payer supplémentairement du péage pour les déplacements quotidiens. Et le troisième, le riverain, il pourrait souffrir de voir automobiles et poids-lourds vouloir échapper au péage à tout prix. Même s’il n’y a pas d’alternative réelle, il reste néanmoins les petites routes, mais qui n’ont ni vocation, ni le gabarit pour supporter un trafic supplémentaire, avec un risque d’accidentologie aggravé.
Donc, il faut rester vigilant, et conserver un statut routier à la RN154. 110 km/h sur une très belle route en 2×2 voies avec chaussées séparées par des barrières de sécurité rénovées. On ne peut que s’inquiéter de voir ces amendements passés dans la loi.
Mesdames et Messieurs les député-e-s, votez utile, pas contre le contribuable et l’usager et le riverain.
2 réponses
[…] Un énorme risque de voir passer la RN154 en autoroute à péage. Une catastrophe euroise ! […]
[…] Un énorme risque de voir passer la RN154 en autoroute à péage. Une catastrophe euroise ! […]
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